Nombreux sont les articles à nous proposer un décryptage des exigences du référentiel Qualiopi et c’est une excellente chose, mais nous allons ici employer une démarche à contre-pied et nous demander comment nous y prendre si nous voulions être certains d’échouer à notre premier audit de certification. Pour ce faire, nous avons sollicité les conseils et retours d’expérience de Fabrice LAUMAY, auditeur Qualiopi pour différents organismes certificateurs et spécialiste de la qualité au sein des organismes de formations.
Fabrice, êtes-vous prêt à relever le challenge et nous dire comment un responsable d’organisme de formation devrait s’y prendre pour essuyer un échec à coup sûr à son audit initial Qualiopi ?
F.L. : « Avec plaisir ! On me demande plutôt l’inverse d’habitude, mais allons-y. Je dirais qu’il est possible de se concentrer sur 4 volets particulièrement problématiques. Ce sont des écueils liés à la préparation de la certification que je retrouve régulièrement. »
Erreur #1. Penser que passer à la certification Qualiopi quand on est déclaré DATADOCK relève de la simple formalité
F.L. : « L’erreur ici est de penser que les exigences, voire même l’esprit, derrière DATADOCK et Qualiopi se recouvrent à 80 %. Il y a certes un socle commun, mais il y a de nombreuses différences et notamment celui du cadre d’audit. La logique passe d’un audit documentaire et déclaratif à un audit sur site avec échantillonnage à la discrétion de l’auditeur. Sur cette base déclarative, certains process ont été déposés sur la plateforme DATADOCK, mais n’ont parfois jamais été mis en œuvre ou appliqués sur un plan opérationnel. Cela rend l’écart entre ce que l’on pense avoir mis en œuvre pour DATADOCK et les constations réelles relevées lors de l’audit initial encore plus grand ! »
Erreur #2. Négliger le temps de préparation
F.L. : « Ne pas préparer son audit ou le préparer sans l’appui du référentiel et attendre que l’auditeur vous établisse une liste des non-conformités pour les rectifier. Ça peut paraître gros, mais c’est assez fréquent ! Le référentiel est exigeant, il touche à de nombreux aspects de l’organisation du prestataire et bien souvent à des démarches jusqu’alors passées sous silence telles que la gestion du handicap ou la veille réglementaire. Il s’avère difficile d’improviser sur ce genre d’exigences. De même, il est nécessaire de faire vivre le système qualité suffisamment en amont de l’audit afin de pouvoir prouver la bonne application des dispositions mise en œuvre. L’absence d’anticipation et la prise en compte tardive ou incomplète du référentiel constituent donc des facteurs clés qui feront le succès ou l’échec de la certification. »
Erreur #3. Opter pour un « Kit Qualiopi » préconçu
F.L. : « C’est réellement la fausse bonne idée. Les outils et process présents dans ces kits correspondent rarement aux besoins et organisations réels du prestataire. On observe par conséquent un décalage parfois important entre les outils standardisés achetés et ce qui est effectivement exploité ou exploitable au sein de la structure. Rappelons-nous que la certification n’est pas une épreuve de sprint, mais une course de fond. Cette dernière s’inscrit dans la durée par les audits de surveillances et de renouvellement. Il est par ailleurs important que le prestataire continu d’adapter son système qualité afin de concilier les exigences du référentiel avec les réalités opérationnelles et cela dans une démarche d’amélioration continue. »
Erreur #4. Sous-estimer l’impact de la sous-traitance
F.L. : « Certains prestataires sous-traitent une part plus ou moins importante de leur activité de formation (parfois jusqu’à l’intégralité de leurs actions de formations !) et en oublient leur obligation de conserver une parfaite maîtrise des prestations sous-traitées. Le référentiel Qualiopi n’interdit pas la sous-traitance, mais le prestataire reste garant de la qualité et du respect du référentiel auprès de son sous-traitant. Penser que la certification Qualiopi de son sous-traitant dispense le prestataire de toutes actions d’évaluation ou de contrôle est une erreur. Le prestataire doit s’assurer que les process qualité de sa structure soient bien mis en œuvre au sein de la structure sous-traitante. Jeu d’équilibriste ; cette exigence n’exonère pas de veiller à la délicate application des règles inhérentes au recours à la sous-traitance ! »
« En somme, éviter de faire une évaluation diagnostique vous permettant de repérer les axes de travail, de mettre en place un plan d’action de mise en conformité préalable à l’audit et commencer le tout au dernier moment ! »
Merci pour ces conseils Fabrice ! Une dernière recommandation peut-être pour être absolument certain de ne pas obtenir sa certification lors du premier audit ?
F.L. : « Et bien, en complément de ceux déjà cités, je dirais “jouer la montre” le jour de l’audit ! Effectuer de nombreuses pauses café, emmener l’auditeur déjeuner dans un restaurant particulièrement éloigné ou mettre trente minutes à trouver chaque document demandé. Cela n’aura que pour seul effet une journée d’audit bien plus longue pour tout le monde et le sentiment d’un dispositif qui n’est pas maîtrisé ! »